MiCA, je vous déclare régulés pour le meilleur et pour le pire – L’année 2022 aura été celle du passage aux choses sérieuses concernant la régulation des cryptomonnaies. L’Europe s’est penchée très sérieusement sur le sujet, et ce, dès le début d’année avec sa réglementation controversée MiCA, pour Markets in Crypto Assets. Retour sur la bataille réglementaire du secteur crypto.
Table des matières
Les tumultueux débuts de la réglementation MiCAUne interdiction du minage repoussée de justesse…… Ou pas ? En fait, si. Ouf !MiCA : la fin du trilogue sur fond de chute de marchéMiCA : sur la route de la mise en applicationMiCAvatar : la Voie du VoteLa réglementation : une histoire de dosageMICA : un décalage administratif pour 2023MiCA : vers un renforcement de la réglementation ?Le cataclysme FTX : l’épine dans le pied de la cryptoL’aveuglement des députés européensLa crypto : l’Europe doit s’en faire une alliée et non la menacerEurope contre crypto : une bataille médiatique
Les tumultueux débuts de la réglementation MiCA
Une interdiction du minage repoussée de justesse…
Au cours de ce début d’année 2022, le contexte de guerre entre la Russie et l’Ukraine a probablement servi de catalyseur dans les avancées de la régulation crypto. En effet, alors que l’Union européenne cherche à asphyxier la Russie à grand renfort de sanctions économiques, il y a un hic : un trou dans la raquette, comme on dit. Et celui-ci porte le nom de cryptomonnaies. Non régulées et incensurables pour nombre d’entre elles, en particulier Bitcoin, la Russie peut compter sur un allié de taille dans le cadre de ses échanges économiques. Non pas que Bitcoin soit du côté des régimes autoritaires fanatiques de la guerre, mais il est simplement du côté de personne et de tout le monde à la fois.
Il n’empêche que pour Christine Lagarde et la BCE (Banque centrale européenne), il est hors de question que le contrôle de ce secteur leur échappe encore longtemps. L’heure de la régulation a sonné pour le secteur des cryptomonnaies.
Sauf qu’à trop vouloir se précipiter, les régulateurs peu informés des tenants et aboutissants de l’écosystème peuvent commettre des impairs, voire des absurdités. Un comble pour des personnes chargées de réguler le secteur, certes, mais une triste réalité. À vouloir réguler trop sévèrement, on empêche tout simplement le développement. Ainsi, une tentative d’interdiction pure et simple du minage crypto a été repoussée fin février 2022.
En effet, sous de faux prétextes, un amendement s’était glissé dans le texte de loi. Et il aurait tout bonnement provoqué l’interdiction du Bitcoin et de toute cryptomonnaie basée sur le Proof of Work (PoW). Une aberration qui aurait bridé les startups cherchant à innover en Europe, tuant dans l’œuf toute initiative technologique. Devant le tollé provoqué par un tel amendement, la loi a été heureusement revue.
… Ou pas ? En fait, si. Ouf !
Néanmoins, les intervenants de l’écosystème crypto ne sont pas au bout de leurs surprises. Moins de deux semaines plus tard, mi-mars, l’amendement interdisant le minage refait surface au sein du texte de loi. C’est le député de Paris Pierre Person qui alerte alors l’écosystème. Les intervenants du secteur n’ont d’autre choix que d’attendre le résultat du vote des députés concernant l’adoption ou non de cette loi le 14 mars 2022. Soupire de soulagement, fin de la transpiration. L’écosystème crypto se remet à respirer. L’amendement bannissant de facto Bitcoin et Ethereum, alors encore en Proof of Work (PoW), est rejeté par 32 voix contre 24, soit un delta de 8 petites voix.
MiCA : la fin du trilogue sur fond de chute de marché
La réglementation MiCA dans son ensemble, par contre, poursuit son cours. Tout l’enjeu consiste à trouver le bon dosage. Car loin d’être une menace, celle-ci pourrait s’avérer réellement bénéfique pour le secteur en faisant naître un cadre adapté. L’objectif est de rassurer les usagers de la blockchain, tout en permettant aux entreprises du secteur de se développer en toute liberté, sans être bridées… au risque de les voir fuir vers des pays plus ouverts d’esprit. Et pour l’Europe, ce serait la certitude d’une fuite de cerveau. Celle-ci engendrerait une perte de compétitivité dramatique dans un secteur technologique émergeant prometteur.
Établir une réglementation prend du temps. Et MiCA ne sera adopté qu’au terme d’un trilogue faisant intervenir la Commission des Affaires économiques et monétaires du Parlement européen (ECON) ainsi que la Commission européenne et enfin le Conseil de l’Europe. Ce n’est qu’au terme de ces différentes approbations que la loi sera adoptée. Les acteurs de marchés auront alors 18 mois pour se conformer à la version définitive de la réglementation MiCA.
Sur la seconde moitié du mois de juin, le texte est soumis aux négociateurs en vue d’une première validation. Plusieurs points font alors encore débat. L’inclusion ou non dans la loi des NFT (non fungible tokens) en premier lieu. Une régulation plus stricte des stablecoins ensuite, ou encore le statut des fournisseurs de service crypto. Pour pimenter le tout, la catastrophe Terra (LUNA) vient agrémenter les réflexions. Et de fait, renforcer un peu plus la conviction des différents acteurs dans la nécessité d’une régulation forte du secteur. Dans le même temps, Celsius interrompt les retraits de fonds des utilisateurs de sa plateforme, rajoutant de l’huile sur le feu. Elle se déclarera plus tard en faillite.
MiCA : sur la route de la mise en application
MiCAvatar : la Voie du Vote
Il ne faut pas non plus se voiler la face. La réglementation du secteur crypto est le moyen idéal pour la BCE de préparer le terrain pour son e-euro. Dégager le passage pour l’arrivée prochaine de sa monnaie numérique de banque centrale (MNBC).
Le 5 octobre 2022, un document officiel nous apprend que le Conseil de l’Union européenne a validé le texte de la loi MiCA. Les deux prochaines et dernières étapes législatives de l’adoption de cette loi seront le vote de celle-ci par l’ECON. Puis, finalement, par le Parlement européen en séance plénière. Le 10 octobre, c’est chose faite pour l’ECON. Le comité valide, non seulement, le texte de la loi MiCA, mais aussi celui de TFR, la réglementation sur les transferts de fonds. C’est d’ailleurs à 28 contre 1 que les membres de la Commission ont adopté cette réglementation très stricte envers le secteur crypto.
La réglementation : une histoire de dosage
La problématique très concrète de ces réglementations anti-blanchiment, c’est leur lourdeur administrative. En tout cas, pour une industrie émergente dont les acteurs sont pour la plupart des startups disposant de peu de moyens. Ainsi, assumer la lourde charge de contrôle imposée par les réglementations MiCA et TFR leur sera tout simplement impossible, faute de moyens. Nous pouvons d’ores et déjà anticiper le résultat. La disparition pure et simple de tous ces petits acteurs pourtant innovants. Du moins, en Europe. La conséquence se traduira en une perte de compétitivité pour l’Europe, en empêchant l’émergence des géants de demain dans le secteur crypto.
Cette réglementation apporte aussi malgré tout son lot de bonnes idées dans le cadre de la protection des consommateurs. Typiquement, il devrait être interdit pour tout influenceur, après application de la loi, de promouvoir un projet crypto donné sans préciser s’il est impliqué dans celui-ci et y possède des intérêts. De fait, le lecteur sera informé du biais possible existant dans les communications de son influenceur préféré sur tel ou tel sujet. Cela pourrait éviter en particulier les manipulations de marché.
Il y a donc du bon comme du mauvais dans la réglementation. Il est primordial de faire comprendre aux régulateurs l’intérêt de laisser se développer un tel secteur pour les perspectives d’avenir économique de l’Europe.
MICA : un décalage administratif pour 2023
En novembre 2022, nous apprenons le report de la présentation du texte de loi devant le Parlement européen pour une raison pour le moins inattendue. La traduction en 24 langues de l’ensemble des 380 pages du texte prend plus de temps que prévu. En effet, la transcription des termes techniques n’est pas chose aisée. Or, il s’agit d’un impératif avant le vote. De fait, celui-ci est reporté à février 2023. Par ricochet, c’est également le texte de loi sur TFR qui devra, lui aussi, attendre son tour.
MiCA : vers un renforcement de la réglementation ?
Le cataclysme FTX : l’épine dans le pied de la crypto
À la mi-novembre, c’est un autre désastre qui fait se resserrer l’étau réglementaire, à savoir la faillite de la plateforme FTX. Il s’agissait alors du deuxième exchange crypto en termes de capitaux déposés dessus. Une catastrophe que la régulation n’aurait pourtant probablement pas permis d’éviter. Tout d’abord, parce que FTX était une plateforme située aux Bahamas que la réglementation européenne aurait été bien incapable d’atteindre. Par ailleurs, cette affaire concerne plutôt des fautes graves de gestion associées à de la fraude. Des méfaits commis par un acteur bien précis du secteur, en l’occurrence Sam Bankman-Fried. La faute ne repose donc pas sur la technologie crypto elle-même que l’Europe cherche à réguler.
Cela n’a pas empêché fin novembre Christine Lagarde de sauter sur l’occasion pour demander dès à présent un MiCA II, alors que la première réglementation n’est même pas encore validée.
L’aveuglement des députés européens
Par ailleurs, le secteur crypto subit depuis l’incident FTX un véritable acharnement de la part des députés. Ces derniers proposent des amendements de plus en plus meurtriers à l’égard de la croissance du secteur. En effet, l’un d’entre eux devrait rendre obligatoire l’agrément de l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) pour les Prestataires de Services sur Actifs Numériques (PSAN). Sans celui-ci, ces entreprises seraient dans l’interdiction d’exercer leurs activités en Europe à partir d’octobre 2023.
Or, ce fameux agrément est à l’heure actuelle impossible à obtenir pour les entreprises du secteur. En effet, même le géant Binance, enregistré PSAN auprès de l’AMF, n’est pas encore parvenu à obtenir l’agrément. La raison ? Ces acteurs sont typiquement dans l’impossibilité de souscrire une assurance dans le cadre de leur activité. Pourquoi ? Simplement parce qu’ils exercent le domaine crypto. Toutefois, disposer d’une assurance est nécessaire pour prétendre à l’agrément. C’est donc le serpent qui se mord la queue et de la pure mauvaise foi de la part des députés qui semblent pour certains n’avoir qu’un seul but. Détruire ce secteur émergent qui menace le pouvoir monétaire des financiers européens.
La crypto : l’Europe doit s’en faire une alliée et non la menacer
Sauf que partout ailleurs dans le monde, cette technologie progresse et évolue, surveillée par des instances moins obtuses. L’Europe n’empêchera pas le développement de la technologie blockchain et des cryptomonnaies dans leur ensemble. Le seul risque qu’elle prend à travers ces réglementations abusives, c’est d’engranger un retard technologique considérable sur ses voisins. À l’image de l’échec d’Internet en son temps, l’Europe ne semble pas apprendre de ses erreurs passées.
Même si cette première règlementation MiCA ne devrait rentrer en application que début 2024 au plus tôt, cela présage de nombreuses difficultés de conformité pour les petits acteurs du secteur, en plus de créer une hyper-surveillance des transactions blockchains… avec la nécessité de dument s’enregistrer auprès des instances européennes, comme l’Autorité européenne des marchés financiers (ESMA).
Europe contre crypto : une bataille médiatique
En attendant, au plus profond de ce bear market, Bitcoin vient de mourir une nouvelle fois. Enfin, selon les dires de la BCE qui, il faut l’avouer, accorde bien de l’importance à une « pseudo » monnaie qu’elle juge soi-disant inutile. À grand renfort de clichés plus absurdes les uns que les autres, il s’agit d’un combat idéologique d’un monopole financier qui lutte pour ne pas perdre son contrôle sur la monnaie. Et il sera bien difficile de lui faire entendre raison, même avec la meilleure volonté du monde et des arguments en béton.
Seule une adoption massive pourra probablement faire pencher la balance. Mais celle-ci est très surement conditionnée par une régulation juste qui permette effectivement aux entreprises du secteur de se développer. D’où les enjeux cruciaux derrière l’adoption de la réglementation MiCA qui verra sans aucun doute le jour ces toutes prochaines années.
C’est une lutte sans merci entre d’un côté les instances européennes, telles que la BCE, qui veulent à tout prix bannir Bitcoin pour laisser le champ libre à un challenger entièrement sous leur contrôle : l’e-euro. Et de l’autre, la communauté crypto qui cherche par-dessus tout à développer cette technologie prometteuse. Bitcoin a échappé une première fois au ban par l’Europe au cours de ce début d’année. Espérons qu’il parvienne à l’avenir à éviter les futures attaques et puisse démontrer au plus grand nombre la force de sa proposition de valeur.
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