Tuer le principe même de la décentralisation. Déjà cet été, les smart contracts des réseaux blockchains étaient menacés par la demande de l’Union européenne (UE) de mettre en place systématiquement des « kill switch » dans leur code. En gros, une porte dérobée permettant aux développeurs du smart contract de geler/annuler un échange lié à ce contrat intelligent. Dans une récente interview, c’est un représentant de la Banque de France (BdF) qui souhaite que les smart contracts soient modifiables pour se conformer à de futures normes de certification (obligatoires) de l’UE. Sinon ? Interdictions !
Les smart contracts devront-ils être modifiables pour être approuvés en UE ?
Les développeurs de la DeFi (finance décentralisée) vont-ils devoir réécrire la totalité de leurs smart contracts pour leur apporter un point de contrôle/centralisation ? C’est ce que semble sous-entendre une interview par DL News d’Olivier Fliche, directeur du pôle fintech et innovation de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR). Cette dernière est une institution intégrée à la Banque de France.
Dans cet entretien, le cadre de l’ACPR semble remettre en cause l’immutabilité des réseaux blockchains. Car dans son idée, non seulement tous les nouveaux smart contracts devraient être d’abord certifiés conformes à des normes européennes (qui n’existent pas encore, soit dit en passant), mais pire, tous les contrats existants devraient être modifiés s’ils ne sont pas conformes.
« [Les smart contracts immuables des blockchains] ne sont pas gravés dans le marbre. Je ne vois pas pourquoi les smart contracts existants ne pourraient pas être soumis à un processus de certification. Et s’ils ne passent pas le test, ils pourraient aussi évoluer. (…) L’idée est d’obliger les intermédiaires en Europe à n’interagir qu’avec d’autres contrats certifiés-UE. »
Olivier Fliche, directeur de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution
Des mises à jour impossibles, qui interdiraient l’usage de certains protocoles DeFi
Évidemment, cette proposition de dénaturer le principe même de la décentralisation des smart contracts de la DeFi a vivement fait réagir les défenseurs du secteur crypto. Notamment Mariana de la Roche Wills qui est membre de l’International Association for Trusted Blockchain Applications (INATBA) et du thinkBLOCKtank.
En plus de rappeler que certains protocoles DeFi ont des conceptions immuables, qui ne peuvent donc pas être mises à jour pour répondre à des normes de certification, cette idée de régulation remet en cause les fondements mêmes des blockchains décentralisées :
« Cela pourrait bouleverser dramatiquement le marché [crypto]. (…) Cela peut avoir des effets similaires à ceux d’une interdiction en termes pratiques [pour les smart contracts non certifiés-UE]. (…) Les écosystèmes cryptos pourraient être divisés entre les contrats certifiés conformes à l’UE et les autres. (…) Limiter l’interaction aux seuls smart contracts certifiés pourrait potentiellement avoir un impact sur la décentralisation, qui fait toute la réputation d’écosystèmes tels qu’Ethereum (ETH). »
Mariana de la Roche Wills, membre de l’INATBA et du thinkBLOCKtank
Heureusement, Olivier Fliche (le cadre de l’ACPR) reconnait lui-même qu’ils « ne pourront probablement pas interdire les smart contracts non certifiés ». Mais, est-ce qu’à la place, ils chercheront à criminaliser les utilisateurs des contrats intelligents non certifiés-UE ? En tout cas, un récent rapport de l’ACPR parlait « d’interdire les interactions pour tous les utilisateurs » avec ces contrats intelligents non approuvés, comme le rappelle DL News. Si les particuliers pourront peut-être passer à travers ces interdictions, les PSAN (Prestataire de services sur actifs numériques) seront certainement contraints de se conformer à ce bannissement.
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