Depuis le premier trimestre de 2020, l’AMF (l’Autorité des Marchés Financiers) a observé une forte augmentation du nombre d’investisseurs particuliers en France. Une vaste étude menée par l’Institut Audirep au printemps 2023, à la demande de l’OCDE, a interrogé des investisseurs particuliers en actions, fonds, financement participatif ou crypto-actifs sur leurs motivations, attitudes et comportements. Voilà ce qu’il faut retenir.
Un quart des adultes français sont des investisseurs
Afin d’obtenir un échantillon suffisamment représentatif et de comparer les anciens et les nouveaux investisseurs particuliers, 1 056 Français ont été interrogés sur leurs avoirs en produits d’investissement.
Résultat : 24% des personnes interrogées ont déclaré détenir au moins un produit d’investissement. La moitié de ces investisseurs ont indiqué avoir commencé à investir en 2020, représentant ainsi 12% de la population adulte française. Par ailleurs, 9% des Français possèdent des crypto-actifs, un taux de détention individuelle qui s’élève à 7% pour les actions cotées.
Source : AMF
Les « nouveaux investisseurs »
Dans le contexte financier post-pandémique, l’étude s’est penchée sur le paysage des investisseurs particuliers en France, définissant comme « investisseurs » des individus détenant au moins un produit financier.
L’étude a différencié un groupe baptisé les « nouveaux investisseurs », qui se distingue par le fait d’avoir fait leurs premiers pas dans le monde de l’investissement depuis le début de la pandémie de COVID-19. Les résultats de l’étude révèlent une dynamique intéressante au sein du groupe.
D’un point de vue démographique, les « nouveaux investisseurs » sont majoritairement des hommes (64%) et présentent un profil plus jeune avec une moyenne d’âge de 36 ans, soit une différence significative par rapport aux investisseurs « traditionnels », qui étaient déjà actifs avant 2020), avec une moyenne d’âge de 51 ans.
Surprenamment, 56% des nouveaux investisseurs ont moins de 35 ans, et 28% ont réalisé leur premier investissement avant d’atteindre l’âge de 25 ans.
Concernant la catégorie socioprofessionnelle, les nouveaux investisseurs affichent une proportion plus élevée de travailleurs et d’employés (37% sont des ouvriers ou des employés de bureau, contre 20% chez les investisseurs traditionnels). Cependant, leur richesse financière moyenne est relativement élevée, atteignant 97 000 euros de moyenne lorsqu’on combine tous leurs investissements.
Passion crypto
L’étude souligne également des différences notables dans les types d’investissements détenus par les nouveaux investisseurs.
Comparativement aux investisseurs traditionnels, une proportion moindre détient des investissements boursiers, tandis que 24% possèdent des actions cotées et 18% détiennent des titres de financement participatif.
Les crypto-actifs suscitent particulièrement l’intérêt de cette nouvelle génération d’investisseurs, avec 54% d’entre eux affirmant en posséder, une proportion significativement plus élevée que les 25% observés chez les investisseurs traditionnels.
Source : AMF
Les raisons pour investir
Les raisons qui ont poussé ces nouveaux investisseurs à s’engager sur les marchés financiers sont diverses. Initialement, la diversification des économies (35%) et l’augmentation des rendements (28%) étaient au premier plan. Les exemples tirés des réseaux sociaux (20%) et les conseils d’amis (28%) ont également joué un rôle crucial, alors que les conseils d’un conseiller financier n’étaient cités que par 15% des nouveaux investisseurs.
Source : AMF
Il est important de noter que parmi les moins de 25 ans constituant 22% des nouveaux investisseurs, le désir d’investir dans le développement durable (31%) était une motivation clé, soulignant l’influence croissante des considérations environnementales dans les décisions d’investissement.
Une donnée surprenante
L’étude met en lumière une facette intrigante : la plupart des nouveaux investisseurs se considèrent également comme des « joueurs » d’argent, participant régulièrement ou occasionnellement à des jeux de hasard en ligne ou hors ligne. 58% d’entre eux jouent à des jeux de hasard, 79% participent à des jeux de hasard payants (ticket à gratter, loto), et 68% placent des paris sur des événements sportifs.
Investissements prudents ?
Bien que les nouveaux investisseurs particuliers en France aient été nombreux depuis le début du COVID-19, les montants investis restent relativement « modestes », avec une moyenne de 97 000 euros. La majorité (51%) a investi moins de 5 000 euros depuis 2020. Les investissements en crypto-actifs se distinguent avec une moyenne plus basse (4 070 euros) par rapport aux actions (5 743 euros) ou au financement participatif (5 575 euros).
Les nouveaux investisseurs se déclarent plutôt prudents dans leurs choix. La plupart d’entre eux (61%) optent pour des investissements à « risques et rendements modérés ». D’autres préfèrent des investissements à faible risque (21%, dont 28% de femmes). Seulement 16% indiquent préférer des investissements à « rendement élevé, mais risque élevé » (20% pour les 25-34 ans, seulement 12% pour les 18-24 ans). Néanmoins, 40% des 18-24 ans affirment que leur priorité est de « gagner beaucoup d’argent rapidement ».
Bonne ou mauvaise idée ?
Le taux de satisfaction des sondés est généralement élevé, avec 62% déclarant être satisfaits de la performance de leurs investissements, en particulier ceux détenant des crypto-actifs (67%). Cependant, 20% estiment avoir subi des pertes.
La majorité des nouveaux investisseurs (79%) considèrent la rentabilité de leurs investissements comme attrayante, et 90% sont convaincus de la rentabilité à long terme de leurs investissements.
Sources d’informations
La partie suivante de l’étude concerne la façon dont les investisseurs se renseignent sur les produits :
« La majorité des nouveaux investisseurs prennent le temps de rechercher des informations sur les produits (69%) ou de demander conseil à des tiers (52%). Les sources d’information sont diverses, allant des documents d’information sur les produits financiers (41%) et des médias spécialisés en finance (36%) aux amis et à la famille (39%). Les réseaux sociaux (28%) et les influenceurs (22%) jouent également un rôle, tout comme les conseillers financiers (32%). »
Source : AMF
Lorsqu’ils cherchent des conseils financiers, les nouveaux investisseurs se tournent vers une banque ou un conseiller financier (49%), des amis et des collègues (48%) ou des membres de la famille proche (40%). Ceux qui consultent des amis et des collègues sont plus susceptibles d’avoir entre 18 et 24 ans (57%), d’investir dans des crypto-actifs (54%) et d’avoir les actifs financiers les plus bas (64%).
Les proches des nouveaux investisseurs (famille, amis, collègues) sont souvent des investisseurs eux-mêmes, avec 58% des nouveaux investisseurs indiquant qu’un membre de leur famille a investi en bourse et 52% dans des crypto-actifs. Ces proportions sont encore plus élevées parmi les amis et la famille, avec respectivement 68% et 62%.
Les 4 types d’investisseurs
Dans la suite de l’analyse, l’accent est mis sur les différents profils des nouveaux investisseurs, mettant en lumière leurs motivations, leurs comportements de recherche d’information et leurs préférences en matière d’investissement.
Quatre profils principaux émergent de l’analyse :
L’Investisseur “Non Informé”:
Âge moyen: 37 ans.
Souvent ouvriers ou employés de bureau.
Motivé par la curiosité et le désir d’augmenter la rentabilité de ses économies.
Caractérisé par le fait de ne pas rechercher d’informations avant d’investir, 77 % d’entre eux se fiant aux conseils d’amis et de la famille.
45 % ont investi dans des crypto-actifs et 23 % dans des actions cotées.
Seulement 29 % expriment le désir d’investir davantage dans l’année à venir.
L’Investisseur “Néophyte”:
Âge moyen : 30 ans, avec 75 % de moins de 35 ans.
Profil fortement numérique, s’appuyant sur les réseaux sociaux (68 %) et les influenceurs (41 %) pour obtenir des informations.
Ont souvent des proches qui ont déjà investi en bourse (80 %) ou dans des crypto-actifs (76 %).
Surestiment leurs connaissances mais ont une compréhension moindre par rapport aux autres nouveaux investisseurs.
65 % détiennent des crypto-actifs et 25 % détiennent des actions cotées.
L’Investisseur “Bien Informé”:
Âge moyen : 38 ans, souvent d’une catégorie socio-professionnelle supérieure.
Investit pour diversifier ses économies et a une meilleure connaissance que les autres nouveaux investisseurs.
Recherche activement des informations avant d’investir, consulte souvent des informations précontractuelles ou des médias spécialisés.
Plus enclin à consulter un conseiller professionnel (62 %) que famille et amis.
58 % ont investi dans des crypto-actifs et 23 % dans des actions cotées.
L’Investisseur “Traditionnel”:
Âge moyen : 37 ans, profil le plus proche des « vrais » investisseurs traditionnels.
Confiant quant à sa situation financière, avec des actifs financiers plus élevés (117 000 € en moyenne) et un investissement moyen (9 317 €).
Investit souvent en vue de la retraite ou d’un projet spécifique.
Recherche des informations sur les produits financiers avant d’acheter (97 %) et est plus enclin à contacter un conseiller professionnel (70 %).
Plus enclin à participer à des jeux de hasard (paris sportifs, jeux de hasard payants).
51 % détiennent des crypto-actifs, 33 % des actions cotées, 26 % des titres de financement participatif, et 31 % ont des investissements dans l’immobilier locatif.
Conclusions des entretiens
Une étude qualitative a aussi été menée auprès de 40 nouveaux investisseurs particuliers (dix pour chaque profil) à travers des entretiens individuels d’une durée de 45 à 60 minutes. Les discussions se sont concentrées sur leurs motivations et leur état d’esprit. Voici les résultats :
Quelles étaient leurs motivations initiales ?
Les principaux facteurs à l’origine de leur décision de commencer à investir étaient les suivants :
La pandémie de Covid-19, synonyme de temps libre forcé et/ou de dépenses réduites.
Les faibles rendements des placements traditionnels.
Le contexte socio-économique et politique en France (réforme des retraites, crise énergétique, etc.), qui a suscité des inquiétudes et incité à la recherche de rendements et de revenus supplémentaires.
Investisseurs rationnels ou impulsifs ?
Deux motivations différentes ont émergé. Certains investissent de manière rationnelle pour diversifier leurs investissements, augmenter la rentabilité ou financer des projets spécifiques. D’autres investissent de manière impulsive, pour le plaisir, par curiosité ou pour comprendre le fonctionnement de ces types d’investissements.
Comment perçoivent-ils l’investissement ?
Pour la plupart des répondants, être un “investisseur” signifie être capable d’investir des sommes assez importantes dans une variété de produits. Le terme évoque une approche sérieuse et risquée. Pour beaucoup, être un “nouvel investisseur” renvoie à l’investissement dans de nouveaux produits tels que les crypto-actifs, les NFT et le financement participatif.
De plus, les répondants ont tendance à voir l’investissement comme un jeu ou un pari, surtout en ce qui concerne les crypto-actifs. Des termes tels que “pari” ou “poker” ont été fréquemment mentionnés en relation avec leur comportement d’investissement.
Pensent-ils avoir pris des risques ?
La plupart des répondants ont déclaré être conscients du risque de perdre de l’argent. Cependant, ils ont exprimé un sentiment de contrôle sur ce risque en ne misant que de l’argent non vital, de petites sommes, ou en investissant dans des produits à faible risque (comme de grandes actions internationales). Il a peu été question du risque d’être victime d’escroqueries ou de fraudes. Cependant, plusieurs personnes ont cité les influenceurs sur les réseaux sociaux comme une source d’information à qui ne pas faire confiance.
Conclusion
En synthèse, l’étude des nouveaux investisseurs particuliers en France révèle une diversité de motivations allant de considérations économiques liées à la pandémie à des impulsions ludiques.
Ces investisseurs, répartis en profils distincts, perçoivent l’investissement soit comme une démarche sérieuse et risquée, soit comme un jeu de hasard, notamment avec les crypto-actifs. Bien que conscients du risque financier, leur confiance dans les influenceurs sur les réseaux sociaux suscite des préoccupations.
Ces résultats soulignent la nécessité d’adapter les stratégies éducatives et réglementaires pour mieux accompagner ces investisseurs, chacun ayant des attitudes spécifiques face au risque financier.
Source : AMF
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