L’univers des NFTs est légèrement différent de celui des cryptos plus classiques, tous ceux et celles qui s’y sont essayés ont dû s’en rendre compte. Au-delà de l’aspect technique de ces tokens aux caractéristiques uniques, il existe aussi un autre paramètre auquel peu semblent avoir pensé : le marché secondaire.
La crypto, terre de libertés
Bienvenue à Cryptoland où la décentralisation et l’esprit libertarien règnent en maîtres. Plus de contrôle par des organismes centraux, (quasiment) pleins-pouvoirs aux utilisateurs, chacun peut devenir sa propre banque et surtout peut profiter d’une liberté numérique qui n’a connu d’équivalent qu’à l’époque du début des internets.
Grâce à Bitcoin et aux cryptomonnaies, nous avons en effet pu découvrir une nouvelle manière d’aborder la création et l’échange monétaire et depuis que Bitcoin existe, nombre d’entre elles ont été créées… sans pour autant survivre très longtemps. Les raisons sont multiples, entre problèmes techniques, scalabilité ou encore utilité réelle, de nombreuses cryptos et blockchain sont aujourd’hui tombées dans l’oubli ou ont été remplacées par d’autres plus performantes.
Puis est venu le temps des tokens, ces jetons dépendants d’une crypto pour profiter de sa stabilité, sécurité et nombre d’utilisateurs mais surtout d’une interopérabilité entre projets en respectant un standard comme l’ERC-20 pour Ethereum par exemple. Cette ouverture à un plus grand nombre de personnes aux possibilités offertes par une blockchain a permis d’innover une nouvelle fois pour ceux et celles qui voulaient entreprendre dans l’aventure.
Mais là encore, de nombreux projets ont échoué. La fongibilité des tokens ne permettant de répondre qu’à certains besoins, il manquait une pièce au puzzle : rendre plus accessible un nouvelle race de jeton : les tokens non fongibles (NFTs).
Nous voici début 2018, un bon crash encore au travers de la gorge, à méditer sur le sens des valeurs face aux quelques CryptoKitties obtenus à des frais 10 fois plus élevés que leur prix initial. Puis la question fatidique arrive : comment parvenir à les revendre ?
Le sens des valeurs
C’est dans les moments où le marché se calme qu’il est plus aisé de se poser les bonnes questions.
Plus de FOMO autour de soi, plus de projets révolutionnaires prêt à supprimer la faim dans le monde, non, essentiellement des projets qui cherchent à trouver des usecase concrets en lien avec leur communauté d’utilisateurs. C’est tout l’avantage d’un bear market, les survivants savent (ou au moins se demandent) pourquoi ils sont là, et la réponse « pour l’argent » dans ces moments ne s’impose plus (ou un peu moins disons).
S’agissant des cryptomonnaies “classiques”, les choses sont assez simples. Si on en est écœuré, il est très simple d’aller sur un exchange et vendre ses coins à bas prix avant de tirer un trait sur cette douloureuse expérience. Pour les NFTs… c’est un peu plus compliqué et c’est l’une des principales raisons pour laquelle la plupart des acheteurs gardent leur actifs. En effet, contrairement aux marchés cryptos, évaluer la valeur d’un NFT est un exercice qui n’est pas à la portée de tout le monde et l’exercice nécessite de croiser plusieurs indicateurs propres au projet.
L’exemple des CryptoKitties (CK)
Acheté fin 2017, le prix initial n’était pas exorbitant : 0.02 Ether (environ $20) mais les frais eux faisaient monter le total entre 70 et 150 dollars très facilement. Une fois les frais revenus à des niveaux décents, les acheteurs constatent déçus que les seules offres reçues sont de l’ordre de 0.005 Ether. Pourtant les parents se sont vendus à 0.2 Ether chacun.
Avec ce problème qui semble tout droit sorti d’un manuel de mathématique scolaire, la solution est pourtant loin d’être évidente. Les critères à prendre en compte sont :
- les “Chattributs” : les traits des CK qui définissent leur couleur ou forme. Certains sont rares, d’autres non
- La génération : est-ce que le CK était parmi le premier de sa génération ou plus tardif ?
- Vierge ou non : un CK vierge vaudra davantage qu’un CK se remettant de ses émotions moins rapidement
- La spéculation : on reste sur un marché spéculatif, il ne faut pas l’oublier. Les acheteurs connaîtront (probablement) la réelle valeur du Kitty mais voudront l’acheter moins cher que sa valeur réelle
Ces indicateurs (au-delà de la spéculation) ont quelque chose de très concret et revêtent une forme d’objectivité. Ils peuvent ainsi servir de base pour une évaluation concrète. Entre ensuite en jeu l’étape de la négociation et c’est la capacité à trouver le prix juste entre acheteur et vendeur qui déterminera le prix de la vente.
L’exemple des CryptoKitties peut s’appliquer à pratiquement toute la classe des “collectibles” qui sont basés sur le “breeding” (Blockchain Cuties, Dragonereum…).
L’exemple des jeux vidéo
Une autre catégorie qui utilise les NFTs sont bien évidemment les jeux vidéos. N’importe qui ayant déjà joué à un RPG connaît la valeur d’une arme légendaire droppée en battant un boss final d’un donjon. Cet arme n’aura pas la même valeur de par ses caractéristiques et les bonus qu’elle octroie au personnage et vaudra donc plus chère qu’une arme basique obtenue au début du donjon. De manière non exhaustive, cela peut être :
- La rareté d’un skin (costume de personnalisation)
- Les caractéristiques d’un équipement (bottes, armures, bouclier, armes…)
- La rareté de l’équipement
- Le supply d’un consommable (potion, matériaux d’amélioration…)
Les critères d’évaluation ne seront pas les mêmes que les collectibles pour une raison très simple : Il ne s’agit pas du même cas d’utilisation. C’est l’un des facteurs qui rend l’évaluation des NFTs plus compliquée que le reste, non seulement chaque actif est différent mais en plus ils ne servent pas tous à la même chose.
C’est donc en fonction du besoin d’utilisation dans le jeu qu’un vendeur acceptera de brader son NFT ou qu’un acheteur sera prêt à le payer à prix d’or. Difficile de parler d’objectivité dans les critères car ce marché pourra dépendre aussi des événements qui arriveront dans le jeu ou d’un changement de stratégie global à cause d’un nerf (changement de caractéristiques d’un sort ou d’un pouvoir par les développeurs). Il sera donc nécessaire de faire une recherche plus poussée pour savoir pourquoi un actif vaudra soudainement plus ou moins cher qu’il y a deux mois.
Le marché primaire et secondaire de l’art
Puisqu’en ce moment tout le monde s’arrache des oeuvres d’art numérique et beaucoup se découvrent une passion de collectionneur, il semble important de rappeler quelques indicateurs qui entourent le marché de l’art.
Tout d’abord, ce marché est tout ce qu’il y a de plus subjectif sur la planète. Ce qui me plaira ne vous plaira pas forcément et vice versa. Et c’est là toute l’importance de ce marché, il est basé sur les goûts de chacun et les prix semblent échapper à toute logique. Pourtant, le marché de l’art est l’un des plus codifiés, c’est donc qu’il existe bien des schémas à prendre en compte avant d’investir…
Le marché primaire
On appelle marché primaire toutes les premières ventes d’une œuvre. Tout ce qui s’ensuit est, de fait, appelé marché secondaire.
En 2020, comme vous pouvez le constater, le marché primaire en termes de volume USD est largement dominé par SuperRare. Les autres marketplaces sont laissées derrière mais l’élément notable reste qu’à partir du confinement mondial le volume USD a considérablement augmenté au fil de l’année.
En termes de volume de ventes seulement, c’est beaucoup plus nuancé et d’autres tendances se dessinent. Ce que cela veut dire, c’est pas qu’il y a eu un nombre “plus de ventes” mais bien le prix des oeuvres qui a augmenté depuis mars 2020. La raison, certains d’entre nous la connaissent bien : la hausse des frais de transaction sur Ethereum.
Pour rentabiliser les frais de mint, le prix des oeuvres a donc augmenté sur toutes les plateformes…
Un élément à prendre en compte qui est particulièrement important pour l’évaluation d’une oeuvre d’art jamais vendue : c’est le prix de vente qui déterminera sa valeur. Cela peut être déterminé par l’artiste ou dans le cas d’une vente aux enchères, le prix final.
Le marché secondaire
Parvenir à vendre une œuvre en tant qu’artiste est une chose, réussir à la revendre en tant que collectionneur en est une autre. C’est là que d’autres critères rentrent en compte :
- Nombre d’édition de l’oeuvre
- Numéro de de l’édition de l’œuvre (la n°1 vaudra toujours plus chère !)
- Côte de l’artiste
- Et bien évidemment, la subjectivité
Et même si l’artiste peut promouvoir ce qu’il se passe sur ce marché, c’est surtout les collectionneurs des premières heures qui vont le faire vivre… ou pas.
SuperRare a toujours été leader à tous les niveaux des différentes marketplaces mais il est intéressant de voir que pendant un temps, son leadership a été perturbé par AsyncArt et Markerplace… jusque la rentrée scolaire 2020.
Les autres marketplaces proposant des prix plus abordables pour acheter des oeuvres, leur marché secondaire a pu se développer jusqu’à ce que les frais deviennent trop importants pour que cela devienne vraiment rentable pour les collectionneurs.
Comment déterminer la valeur d’un NFT ?
Vous l’aurez compris, le marché secondaire des NFTs est très différent de celui des cryptos après une ICO. Cela ne demande pas seulement une analyse technique ou fondamentale avant d’investir mais aussi des compétences en commerce de manière à parvenir à vendre vos actifs.
Il est donc important de garder en tête que :
- Si vous achetez une oeuvre d’art NFT, c’est avant tout pour encourager un artiste, ensuite parce que l’oeuvre vous plait, que vous comptez la garder et subsidiairement, peut être la revendre un jour
- Si vous achetez un objet utilisé dans un jeu vidéo, c’est avant tout parce que vous en avez besoin ou alors vous connaissez son utilité et donc sa valeur
- Si vous achetez un collectible en pré-vente, gardez le s’il est rare mais revendez le vite dès lors où vous pouvez le faire (NBA Top Shot)
- Certaines whales achètent en masse des actifs à la pré-vente mais aussi sur le marché secondaire à des prix très bas de manière à faire monter le “floor price” ultérieurement
Le marché secondaire des NFT peut-être perçu comme une grande brocante décentralisée ouverte au monde entier : vous pouvez avoir la chance de dénicher une perle rare tout comme tomber sur une arnaque ! Sauf qu’à la différence d’une brocante qui dure généralement une journée entière et où il sera possible de retourner voir le vendeur pour vous plaindre, une fois que vous aurez fait l’achat de votre NFT, il y a peu de chance que le vendeur vous le rachète si vous vous plaignez de la qualité de votre acquisition.
Même si actuellement le marché des NFTs semble exploser, rappelez-vous que celui des cryptos a lui aussi connu ses moment d’ébullition. Or, les NFTs constituant un des moyens les plus évidents de dépenser les cryptos il ainsi parfaitement normal de voir des volumes qui semblent impressionnant aux premiers abords. Restez curieux mais surtout restez prudents et responsables dans vos achats !
L’article Quelle valeur pour mon NFT ? Tout comprendre aux marchés primaires et secondaires est apparu en premier sur Journal du Coin.