2022 – 2023 : le metaverse, déjà mort d’être né trop tôt ? Le Meta-Hebdo

Delta Charly Delta – Né dans les romans dystopiques des années 1990, le metaverse a connu une envolée exceptionnelle ces deux dernières années. Cependant, alors que les douze coups de minuit marquant la fin de l’année approchent, force est de constater que le métavers semble malade.

Handicapé par de lourds défauts de graphisme, le métavers essuie également les plâtres d’un marché crypto qui ne l’a que trop blessé. Fragilisé, le terme de « métavers » a alors essayé de panser ses blessures avec les géants du Web 2, GAFAM et autres sociétés internationale avides de trouver une seconde vie dans un monde virtuel.

Comment atteindre les ondes de ce doux métavers qui, sur le papier, nous promet monts et merveilles ? A priori, on ne peut pas. Ou du moins pas encore. Face à cet échec, certains experts se demandent si le métavers ne serait pas né trop tôt ? Pire, ne serait-il pas déjà mort ? Tentons un massage cardiaque.

Un début d’année 2022 dans la lumière

L’ADN du metaverse

Pour comprendre ce qui compose le métavers (metaverse en anglais), il convient de reprendre une brève définition.

Le métavers désigne l’ensemble des univers virtuels en réalité augmentée ou en réalité virtuelle. Espace virtuel d’un monde interconnecté, le Web 3 et les technologies de la blockchain ont pu se saisir de l’opportunité que propose la notion de métavers. De l’utilisation des NFT, à l’application de la gouvernance dans un espace virtuel – mais bel et bien réel – les technologies de la blockchain ont trouvé rapidement des points de convergence avec le métavers.

Les grandes marques ont également su reprendre le terme. Motivées par les succès de grands jeux et de métavers populaires tels que Minecraft ou encore Roblox : l’espace virtuel proposé par le métavers est devenu, en l’espace de quelques mois, le réseau social de demain, l’espace publicitaire du futur. Voici comment les grandes marques ont espéré se soigner de l’essoufflement du Web 2 avec le métavers.

Le métavers a donc animé pendant plusieurs mois les grandes marques et les GAFAM. Microsoft, Google, ou encore Meta bien sûr. Les sociétés de luxe également comme Luis Vuitton et Gucci, ou encore le secteur du sport : personne n’a été insensible aux charmes du métavers.

Tous ont entamé le grand voyage dans le monde virtuel afin d’étendre, d’étirer le maillage de leur réseau et de leur communication. L’année a alors été ponctuée d’évènements métavers plus ou moins célèbres. Journée de la femme, la guerre en Ukraine ou l’implication politique dans cet univers virtuel sont autant de thèmes qui ont trouvé un écho dans le métavers, et dans nos colonnes.

L’intérêt des grandes marques pour l’autre monde : la seconde naissance du metaverse

On comprend donc que tout au long de ce début d’année, les grandes marques, qu’elles soient françaises – Renault, Marianne par exemple – ou bien internationales – nous pouvons penser à Warner Music Group – n’ont eu de cesse de faire des partenariats Web 3. Né de la plume de Neil Stephenson en 1992 dans le roman Snowcrash, le métavers vit alors une renaissance.

Quelques mois passent. Le début d’année 2022 se voit ponctuer de partenariats nombreux. C’est le signe d’un secteur en pleine croissance. Parfois farfelus, chaque partenariat et association attisaient la curiosité. Oui, rappelez-vous de Carrefour et de son métavers dans Decentraland ou bien encore de Slipknot qui s’est mis à crier sur les réseaux sociaux qu’il rejoignait The Sandbox.

Autour de cette effervescence, aussi soudaine qu’éphémère, pourrait se situer l’âge d’or du métavers. Alors, jeune et épanoui, il va même jusqu’à s’inviter sur la scène des MTV Awards en compagnie de Eminem, Snoop Dogg et des NFT Bored Ape Yacht Club pendant l’été 2022.

Les âmes usées par ce marketing feront surement la grimace à l’évocation de cet exemple. Toutefois, il convient d’accepter que la visibilité offerte au NFT Bored Ape Yacht Club et au metaverse The Otherside était encore inédite.

Par ailleurs, nombreux sont les exemples de cet engouement du métavers pendant cette année 2022. Nous pouvons citer les multiples dépôts de marque qui ont augmenté sur la période. Nous pouvons également penser à l’utilisation des NFT, de plus en plus répandue. Cependant, levées de fonds, partenariats, dépôts de marque et autres publicités à la télévision n’ont-elles pas dénaturé le métavers ? Les doses de publicité et de marketing l’auraient-elles rendues malade ?

NFT The Otherside représentant des lands du métavers des Bored Ape Yacht Club

Metaverse, métavers, metaverse : un mot apprivoisé, mais pas adopté

À l’image du nombre de possibilités de l’orthographier, le métavers est certes accepté dans notre vocabulaire, mais il ne semble pas trouver sa place pour autant. Parfois moqué, parfois incompris, ce que l’on présente comme l’internet de demain apparait comme une fatalité commerciale pour les usagers qui l’utiliseront plus tard.

Et pourtant. Dans cette conquête frénétique du métavers, Facebook a décidé de poser fièrement son drapeau en se renommant Meta en octobre 2021. La multinationale avouait ainsi se concentrer sur les mondes virtuels en changeant son nom. Orientée vers l’avenir, portée par des applications drainant des millions de visiteurs quotidien, Meta ne semble cependant pour le moment pas avoir réussi à relever les défis du métavers.

En effet, l’ascenseur émotionnel a été rapide. Au cours du printemps et de l’été, le métavers a été un sujet de discussion dominant. En automne, le terme « metaverse» a même été sélectionné comme finaliste pour le mot de l’année de l’Oxford English Dictionary. Toutefois, en quelques semaines, l’engouement autour du métavers s’est largement dissipé. Les populations des mondes virtuels ont chuté. Decentraland a été déserté, ou presque d’après DappRadar. Le mot de l’année d’Oxford a finalement été attribué au terme « mode gobelin », désignant un comportement avide et négligent sur internet. Sans commentaire.

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Le metaverse, un mort-vivant ?

Meta et Mark Zuckerberg : le coup de grâce ?

Impossible d’évoquer le metaverse, sans évoquer le cas de Mark Zuckerberg, PDG de Meta. Bien que certains efforts aient pu être visibles, notamment dans le développement de casque VR Oculus, la société n’a pas réussi à se propulser dans l’autre monde.

Des promesses d’un domaine futuriste et d’une expérience numérique sensationnelle, Meta n’a su pour le moment que montrer le brouillon d’un métavers qui s’annonce… Meta-moche. Mark Zuckerberg n’est pas le seul dans ce cas. L’Europe qui s’est également essayée à l’exercice a proposé un métavers peuplé de trombones. Comment en est-on arrivé là ? Qui a tué le métavers ?

Certains pourraient dire Mark Zuckerberg avec un avatar à Barcelone. Mais, ce serait probablement bien trop simple et trop manichéen.

Mark Zuckerberg avec son avatar à Barcelone

Les Metaverse du web 3 abandonnés ?

Le métavers, grâce à ce succès, a même pu, être pendant l’espace de quelques mois, celui qui permettrait l’essor et l’adoption des technologies de la blockchain. En effet, Insomnia Labs, la société de publicité métavers de M.Huang, son PDG, a passé l’année 2022 à aider des entreprises telles que Under Armour et L’Oréal à explorer les possibilités offertes par le Web3. Ces services proposaient notamment des campagnes publicitaires intégrant des NFT, ou bien en créant des DAO.

Pour rappel, le terme NFT signifie Non-Fungible Token ou jetons non fongibles. Ce sont des actifs numériques uniques utilisés sur la blockchain. Les DAO (Decentralized Autonomous Organization ou organisation autonome décentralisée) sont des organisations gérées par une communauté de participants toujours en utilisant la technologie blockchain.

Plus tôt cette année donc, lorsque le métavers a suscité l’intérêt du grand public, de nombreux utilisateurs se sont rués sur des plateformes de métavers telles que The Sandbox et Decentraland, porté encore une fois par de grandes célébrités comme Paris Hilton. Des sommes considérables ont été dépensées pour acheter des terrains virtuels dans ces mondes. En février et mars, Decentraland a enregistré en moyenne 50 000 visiteurs quotidiens. Cependant, ce chiffre a rapidement chuté de plus de 80 % comme nous l’évoquions dans cet article.

Pas d’utilisateurs, pas de metaverse

Fort de son activité et de son expérience construite, M.Huang a vu l’année passer. Alors que les mois défilent, il en vient à ce constat :

« Peu importe le nombre d’utilisateurs que vous parvenez à diriger vers la page de destination (…) Ils ne vont pas se convertir et ils ne vont pas rester, car ils ne trouvent pas de valeur dans l’expérience proposée.»

Huang, PDG de Insomnia Labs – Source : Decrypt

Selon des experts comme Huang, le problème de l’adoption par les utilisateurs est en grande partie à l’origine de cette situation. Le métavers promettait d’intégrer des millions de personnes à une nouvelle vision d’Internet, mais même ceux qui ont tenté l’expérience ont fini par abandonner. Huang déclare alors non pas une mort du métavers, mais une activité en apnée, comme suspendue :

« Pour la plupart cette année, nous avons recommandé très peu d’activations de campagnes métavers, et pour une bonne raison (…) Les utilisateurs ne sont pas là. »

Le contexte économique international n’est bien sûr pas à mettre de côté dans cette agonie du métavers. Alors que la valeur de Bitcoin chute, l’effondrement des écosystèmes Terra, Celsius ou encore plus récemment FTX ont participé à une crise de confiance. Le métavers ne semble pas être au top de sa forme, mais de là à dire qu’il est mort. Cela semble peut-être galvauder le mot et surtout son sens. Peut-être pourrions-nous plutôt nous réjouir de l’essoufflement commercial de l’utilisation de ce mot pour nous concentrer plutôt sur son sens. Aussi, au-delà des progrès techniques essentiels pour faire évoluer le métavers tel qu’il devrait être, les démarches web 3 telles que les NFT et les DAO dessinent chaque jour les infrastructures sociales d’un metaverse interconnecté, dans l’autre monde.

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